Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

  • : VERONIQUE NARAME - JOURNALISTE
  • : Journaliste Contact : veronique.narame@free.fr | Twitter : @veroniquenarame
  • Contact

LE CHOIX DE LA REDACTION

 

 

ALTERNATIVES INTERNATIONALES  n° 067

Juin 2015

       Boko Haram épuise le Cameroun

Par Véronique Narame
A Maroua et Minawao
 
couverture
                  

Depuis un an, le Cameroun fait face aux assauts meurtriers de la secte nigériane Boko Haram. Et contribue, depuis 2013, à l'accueil sur son territoire de 40 000 réfugiés nigérians dans le camp de Minawao.

 

Lire la suite.

Recherche

LE CHOIX DES INTERNAUTES

JUIN 2015

Algérie / Industrie électrique et électronique : Moderniser et restructurer

Algérie  / Maritime : L'Algérie combine mer et terre

Côte d'Ivoire / Socitech Groupe : Contribuer à la digitalisation de l'Afrique

Burkina Faso / Sibiri François Yaméogo, Styliste Modéliste

Algérie / Photo reportage au Salon international du livre d'Alger

Burkina Faso / Des infrastructures performantes pour l'industrie

 

 

3 février 2012 5 03 /02 /février /2012 21:04

 

Jean Ping, Président de la Commission de l'Union africaine

«L’Afrique constitue un espoir»

 

Paru dans Hommes d'Afrique Magazine

Janvier 2012


100_1240-bis-copie-1.jpgA la veille des élections au sommet de l’Union africaine (UA ), entretien exclusif avec Jean Ping, président de la Commission de l’UA, qui analysait, en août 2011, les mutations à l’oeuvre en Afrique.

Qu’incarne l’Afrique au plan international ?
Alors qu’elle incarnait auparavant le désespoir, l’Afrique constitue maintenant un espoir, compte tenu de l’importance de ses ressources, de son marché et de son potentiel humain. En 2050, il y aura deux milliards d’Africains tandis que l’Europe, les Etats-Unis et le Canada réunis n’atteindront pas le milliard. Cela induit nécessairement des changements.

En un demi -siècle , comment ont évolué les comportements à l’égard du continent ?
Dans un premier temps, s’est instaurée une relation de type néocolonial. A cette époque, le continent africain, qui avait été divisé entre l’Afrique subsaharienne et l’Afrique du Nord, était perçu par l’Europe comme un simple réservoir de matières premières. Cette attitude a duré un temps. A la fin des années 1970, l’Occident s’est finalement détourné de l’Afrique qu’il a alors considérée comme perdue. C’était l’époque de l’Afropessimisme. Tous les investissements allaient à l’Asie.
Le continent africain - Afrique du Sud exclue – en recevait moins que Singapour ! La société Alcatel, par exemple, investissait en Chine, lequel pays exportait ensuite les procédés de la firme française... en Afrique ! C’est ainsi que les
partenaires chinois ont découvert le continent africain et son milliard de consommateurs, qui a en retour acheté des produits made in China. Les Chinois et les Indiens, qui étaient demandeurs de matières premières pour nourrir leur
croissance à deux chiffres, avaient de surcroît les moyens d’investir en Afrique. L’Australie, le Brésil, la Corée et les pays du Golfe ont fait de même.

Quels avantages ces investissements étrangers procurent- ils ?
Ils bénéficient au continent africain. Prenons le cas des hydrocarbures. Alors qu’au départ, nous étions seulement producteur de pétrole, nous sommes en passe de maitriser la chaine pétrolière, depuis la production jusqu’à la pompe, via le raffinage.

Quelles sont les autres sources de revenus qui bénéficient à l’Afrique ?
Les transferts d’argent des Africains de l’étranger sont également une importante source de financement. Les fonds qui proviennent de la diaspora sont, à l’heure actuelle, supérieurs à ceux de l’aide internationale. Un pays comme le Cap Vert a ainsi augmenté ses revenus grâce aux diasporas d’Amérique et d’Europe.
 

Propos recueillis par Véronique Narame

Partager cet article
Repost0
1 février 2012 3 01 /02 /février /2012 15:53

 

« L’avenir du continent africain

s’annonce avec de bons espoirs » 

Bassary Touré, vice-président de la BOAD



                                      Paru dans African Business – Février-Mars 2012


100_1395.JPG-bis.jpgDans un contexte de crise internationale et d’incertitude sur les marchés financiers,  Bassary Touré, Vice-Président de la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), livre son analyse.

Comment le franc CFA réagit-il à la crise de la dette souveraine en Europe et aux Etats-Unis ?
Cette crise, qui est à l’origine de la nervosité actuelle des marchés financiers internationaux, a créé un déficit de confiance au niveau des investisseurs et un climat d’incertitude sur les marchés. Les fondamentaux des économies de la zone franc (Uemoa, Cemac et Comores) sont néanmoins solides. Depuis 2004, la croissance moyenne est de 4,4%. Ce niveau appréciable a été obtenu au prix de multiples réformes et dans un contexte particulièrement difficile de chocs financier et économique en 2008-2009, et alimentaire et énergétique en 2008.
En outre, la zone dispose d’une monnaie forte avec un taux d’inflation moyen de moins de 3% et un taux de couverture de plus de 100%, pour une norme de 20%. Les cours des principales matières premières exportées (cacao, or, coton, etc.) se sont par ailleurs convenablement orientés ces dernières années. Cette embellie, en plus du dynamisme de la demande - notamment celle provenant des pays émergents - a permis à la zone franc de bien vendre ses matières premières. Elle a renforcé ses réserves de changes pour faire face à ses besoins d’importation, soutenir la parité de sa monnaie vis-à-vis de l’euro et atténuer d’éventuels chocs de balance des paiements.

Quelles sont les caractéristiques du marché financier de l’Uemoa ?
C’est un marché d’avenir qui intéresse tous les grands acteurs financiers. Il est jeune, mais présente beaucoup d’avantages et une grande opportunité de mobilisation de ressources. Avec plus de 90 millions d’habitants et un taux actuel de bancarisation en dessous de 20%, la marge de progression de ce marché et son potentiel de collecte de l’épargne sont importants.
Au plan local, en dehors des émissions souveraines (les Etats sont très actifs sur le marché), les institutions comme la BOAD et la Banque d'investissement et de développement de la Cedeao (BIDC) sont des grands émetteurs non souverains. La BOAD lance en moyenne une émission par an. Les industries portuaires de la zone interviennent aussi de manière significative.

Quel est le rôle de la BOAD ?
La BOAD est le principal émetteur non souverain des titres d'emprunts au niveau de l’Uemoa. Elle a joué un rôle pionnier en initiant, dès 1993, la première émission d'emprunt en FCFA sur le marché financier régional, et a contribué à la création de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM), dont elle détient 10% du capital.
Pour soutenir l'intégration régionale, la BOAD a initié, en étroite collaboration avec les autres institutions communautaires, le Projet de développement du marché financier (PDMF). Il a été mis en œuvre avec le concours de la Banque mondiale, de l'Agence française de développement (AFD) et de l'Agence canadienne de développement international (ACDI). Le PDMF renforce les capacités institutionnelles des acteurs clés du marché financier régional, à savoir la BOAD, le Conseil régional de l'épargne et du marché financier (CREMF), la Banque Centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (Bceao), la BRVM, la Commission de l'Uemoa…
La BOAD participe également à la création ou à la recapitalisation de banques en mettant à leur disposition des lignes de refinancement. Depuis quelques années, elle a diversifié ses interventions pour renforcer son action de développement, en dépit d’un environnement économique et politique instable. Elle se prépare d’ailleurs à la notation internationale pour lever les ressources nécessaires au financement de ses activités.

Que finance la BOAD ?
Ses financements sont destinés aux huit Etats membres de l’Uemoa et concernent les projets d’infrastructures (routières, énergétiques, hydrauliques…), les investissements agricoles ainsi que la réalisation d’études. Pour l’exercice 2011, un objectif annuel de plus de 200 milliards de FCFA a été retenu pour le secteur public. S’agissant du guichet privé, principal vecteur de croissance, il est d’environ 200 milliards de FCFA, et est dédié au soutien au secteur bancaire et aux PME. La BOAD finance également l’innovation via les mécanismes de développement propre et d’adaptation aux changements climatiques.

D'où proviennent ses ressources ?
La Banque émet des titres d’emprunts sur le marché intérieur de l'Uemoa en francs CFA et contracte des prêts auprès des organismes internationaux - ou étrangers - publics ou privés. Le marché régional des capitaux – qui correspond à plus de 50% des ressources d’emprunt -  est la source privilégiée de mobilisation pour le financement du secteur privé.
Les partenaires non-résidents s’intéressent aussi au marché financier de l’Uemoa et ont contribué à l’augmentation de 50% du capital de la BOAD, lequel est passé de 700 à 1 050 milliards FCFA en juin 2010. Les contributeurs les plus visibles sont la SFI, l’AFD, l’ACDI… La Chine est de plus en plus active. Lors de la dernière augmentation de capital, elle a été parmi les premiers à notifier son accord de principe. 

La création d’un marché commun africain est-elle à l'ordre du jour ?
La question de la connexion des marchés demeure une préoccupation constante des autorités et des organisations continentales et régionales africaines. Toutefois, l’expérience actuelle de l’Europe commande de bien cerner les contours de cette intégration afin qu’elle bénéficie vraiment aux populations africaines. Au niveau de la sous-région, des réflexions ont été engagées depuis plusieurs années avec les pays ouest-africains non membres de l'Uemoa - notamment le Ghana et le Nigeria - et avec ceux de l'Afrique centrale qui ont en commun le FCFA.
Dans le cadre de l'Afrique de l'Ouest, une première étape formelle a été franchie avec la signature, en 2009, d'un Memorandum Of Understanding, lettre d'intention qui définit la création d'une plate-forme de cotation commune. Certains titres de sociétés, a l’instar de celui d’ETI – Ecobank, sont cotés simultanément dans - et hors - la zone Uemoa. Les réflexions visent à multiplier ce type de montage, et à favoriser l'élargissement du champ géographique des émissions. Les dispositions juridiques et réglementaires doivent à cet effet être édictées et adoptées par les autorités des différents marchés en présence.

Vous revenez de la Conférence sur  le climat à Durban. Quel est le coût du dérèglement climatique pour la sous-région ?
Entre 2000-2008, le montant des dommages liés aux inondations dans l’espace Uemoa a été estimé entre 189 et 388 milliards $. Le dérèglement climatique constitue une menace majeure pour la croissance économique et le développement durable, et risque de  compromettre les progrès, encore fragiles, pour l’atteinte des Objectifs du millénaire pour le développement. 

Quelles sont les contributions versées par les Etats pollueurs aux pays victimes de sécheresses, d'inondations et aux réfugiés climatiques ?
Dans le cadre de la Convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques et du Protocole de Kyoto, des financements sont disponibles et libres d’accès aux Etats de l’Uemoa. Plusieurs initiatives bilatérales et multilatérales ont été développées notamment par le Japon,  la Norvège, l’Allemagne et la Commission européenne. On peut aussi citer le Fonds de partenariat pour la réduction des émissions de carbone forestier, le Dispositif mondial de réduction des effets des catastrophes et de relèvement et les Fonds d’investissement climatiques gérés par la Banque mondiale.
La BOAD s’est pour sa part vue confier la gestion du Fonds de développement de l’énergie mis en place dans le cadre de l’Initiative pour l’énergie durable.  Elle a par ailleurs signé avec la KfW Bankengruppe un contrat de financement d’un montant de 10,66 millions d’euros (6 994 millions de FCFA) pour la mise en œuvre au Niger de l’opération « Facilité du Sahel », et pour d’autres projets au Burkina Faso, au Mali et au Sénégal.

Comment se profile l'avenir du continent ?
L’avenir du continent africain s’annonce avec de bons espoirs malgré le contexte général de crise économique mondiale. L’Afrique subsaharienne a enregistré un taux de croissance du PIB annuel de 5 % pendant dix ans, avec des pointes de plus de 6 % entre 2006 et 2008. La croissance s’est généralisée dans plusieurs pays du continent. Le secteur privé africain attire de plus en plus d’investissements et le climat est propice aux réformes. Au plan social, de nombreux pays ont enregistré des progrès suffisamment rapides pour atteindre la plupart des Objectifs de développement pour le millénaire (ODM), d’ici à 2015.
Pour les prochaines années, les efforts de développement du continent doivent être soutenus. L’objectif est de garantir l’accès à l’énergie électrique et à l’eau potable, la sécurité alimentaire via une agriculture adaptée aux changements climatiques, et l’accès aux services financiers pour les plus démunis. La promotion de la création d’emplois, notamment pour la jeunesse, est également la priorité.



                                                                           BIO EXPRESS
Bassary Touré a été ministre de l’Economie et des Finances de la République du Mali, de 1991 à 1992 et de 2002 à 2004. Avant sa désignation comme vice-président de la BOAD en 2008, il a été représentant régional résident du groupe de la Banque africaine de développement (BAD) à Libreville (Gabon) et directeur exécutif de la Banque mondiale de 1998 de 2002. Il a exercé comme consultant international  pour le  Programme  des Nations-Unies pour le développement (PNUD), pour la Fondation africaine pour le renforcement des capacités (ACBF) et pour les Organismes bilatéraux de financement en 2004. 

Partager cet article
Repost0
7 janvier 2012 6 07 /01 /janvier /2012 18:18

 

              « Engagé auprès des pouvoirs publics »

                                                Paru dans Arabies – Janvier 2012


P110221-16.jpgPDG du groupe pharmaceutique Saïdal depuis avril 2010, Boumediène Derkaoui analyse le succès de cette entreprise publique créée en 1982, qui renforce sa position sur le marché algérien du médicament.


Quel est le spectre d’intervention du groupe Saidal et sa capacité de production ?
Nous nous inscrivons dans la politique nationale du médicament, impulsée par les pouvoirs publics, en proposant une large gamme de produits, qui répond aux attentes des malades et aux préoccupations des professionnels de la santé. Depuis qu’il a été décidé d’arrêter l’importation des médicaments fabriqués localement, Saïdal s’est engagé auprès des pouvoirs publics à approvisionner le marché, en fonction de ses capacités.
Nous travaillons donc sans relâche à la régulation de la production en ne ménageant aucun effort pour en assurer la disponibilité et son accessibilité aux prix les plus bas. Nous développons ainsi 180 produits qui couvrent 20 classes thérapeutiques et 18 formes galéniques. S’agissant du médicament générique, le groupe est leader national et souscrit à la politique des pouvoirs publics en fournissant les principales classes thérapeutiques qui traitent les maladies chroniques telles que le diabète, l’hypertension artérielle et autres pathologies.

Quels sont les moyens dont dispose le groupe industriel pharmaceutique pour soutenir sa croissance ?
Nous disposons actuellement de quatre filiales chargées de l’exploitation de treize sites de production, ainsi que d’un centre de recherche et développement qui va du reste être délocalisé à Sidi Abdallah d’ici à 2013. Trois unités effectuent la commercialisation des médicaments auprès d’un réseau de 150 grossistes.
Pour enrichir sa gamme de produits et consolider sa position sur le marché, Saidal modernise et développe ses sites. Ce plan est encouragé par les pouvoirs publics. Sur la période 2010-2014, six nouvelles unités de production sont programmées en plus d’un centre de recherche et de développement et d’un laboratoire de bioéquivalence. L’ensemble des moyens nécessaires est mobilisé, les sites sont identifiés et la gamme de produits est définie. Les études sont quasiment achevées et les financements disponibles. Le démarrage des travaux est par conséquent imminent.
Le soutien au développement des ressources humaines est également à l’ordre du jour. L’Etat apporte son concours via un crédit bonifié, dédié à la mise en œuvre de ce programme. Sa réalisation est portée par les cadres et les collectifs qui escomptent des retombées légitimes en termes d’évolution de carrière, de conditions de travail, de formation et de rémunération.
Pour l’heure, l’effectif de Saïdal est constitué de 4 100 salariés, dont 1 300 cadres, soit le tiers (33%) du personnel. Le potentiel humain, qui dispose des compétences de base, est majoritairement jeune, ambitieux et motivé. Il est de surcroît fortement attaché à l’entreprise.

Le groupe envisage-t-il un développement à l’export ?
Le marché national demeure notre priorité compte tenu de nos parts de marché et de nos engagements vis-à-vis des pouvoirs publics. Toutefois, des opérations ont été réalisées vers les pays d’Afrique et d’Asie. Saidal a pour ambition de se développer à l’international en se fixant un objectif de 5 à 10% de son chiffre d’affaires à l’exportation, à l’horizon 2015.

Qui sont les actionnaires de Saïdal et comment l’actionnariat a-t-il évolué ?
L’état est le principal actionnaire. Il détient 80% des actions, 20% étant pour l’essentiel détenues par des personnes physiques. Malgré l’existence d’une bourse des valeurs à Alger, la tradition et la culture boursière ne sont pas développées en Algérie et les transactions ne sont pas courantes.

Comment se porte le marché du médicament en Algérie ?
Le marché algérien est attractif, en forte croissance et en perpétuelle évolution du fait des mutations profondes qui ont opéré ces dix dernières années. L’Algérie s’emploie en effet à développer une industrie nationale qui soit en mesure d’assurer une couverture croissante des besoins de sa population, afin de réduire la facture des importations qui ne cesse d’évoluer. L’Etat a donc pris d’importantes mesures pour encourager les investissements dans la recherche et le développement, et pour accroître les performances de l’industrie pharmaceutique. La libéralisation du commerce a renforcé cette tendance haussière, tout comme la mise en place du système de remboursement des médicaments.

Si la production locale connaît une évolution intéressante ces dernières années, en couvrant à l’heure actuelle plus de 30% des besoins exprimés, le marché demeure à plus de 60% dépendant (en valeur) des importations. Comment cela s’explique-t-il ?
A mon sens, les perturbations observées (comme c’est le cas notamment de certaines ruptures) s’expliquent par les difficultés à saisir en temps réel les mutations accélérées de la demande. Cela peut aussi être induit par des dysfonctionnements dans la filière distribution. Les pouvoirs publics se sont donc fixés, comme objectif intermédiaire, de couvrir 70% des besoins, d’ici à la fin 2015. Ce seuil pourra être atteint en intégrant les nombreux projets d’investissements mis en œuvre par les autres laboratoires.


Partager cet article
Repost0
11 septembre 2011 7 11 /09 /septembre /2011 18:17

 

Abidjan-Ouaga : après la crise

 

Paru dans Afrique Magazine – Août-Septembre 2011

 

arthurekafando.jpgEntre les deux capitales, la libre circulation des biens et des personnes doit se faire, nous explique le ministre burkinabé du Commerce, de l'Industrie et de l'Artisanat, Arthur Kafando.

 

Coton, produits pétroliers ou alimentaires, engrais, infrastructures de transport, énergie… Où en sont les échanges économiques et commerciaux vitaux pour les deux pays voisins que sont le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire ? Le point avec Arthur Kafando, ministre burkinabé de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat.

 

AM : Quel est le volume des échanges avec la Côte d’Ivoire ?

Arthur Kafando : Il est important. Avant la crise ivoirienne, 60% de nos exportations de coton y transitaient, les 40% restants étaient acheminés vers les ports de Lomé [Togo] et Tema [Ghana]. En outre, 70% de nos produits d’importation issus de la zone UEMOA [Union économique et monétaire ouest-africaine] proviennent de ce pays. C’est notre principal fournisseur, avec 130 milliards F.CFA (198 millions d’euros) de valeur importée, sur les 140 milliards (213 millions d’euros) provenant de la sous-région. Les produits pétroliers sont au premier rang des dépenses, avec 25% pour le gasoil, 20% pour le super et 10% de fuel. Les engrais, les cigarettes, l’huile de consommation alimentaire ainsi que les produits manufacturés proviennent également de Côte d’Ivoire.

 

La reprise du transport entre Ouagadougou et Abidjan est-elle à l’ordre du jour ?

Pendant la crise, d’autres ports de transit ont suppléé celui d’Abidjan. Ce fut le cas de Takoradi et Tema, au Ghana, ainsi que de Cotonou, au Bénin, pour le stockage des hydrocarbures, et de Lomé. A présent que les activités au Port autonome d’Abidjan ont redémarré, les échanges entre les deux pays – par la route et le rail - vont pouvoir s’intensifier. Ce sera sans conteste profitable à la région Ouest du Burkina Faso, qui est équipée pour les gros tonnages, avec le port sec de Bobo-Dioulasso, des unités industrielles ainsi qu’une station pour les hydrocarbures. S’agissant du train, sa reprise est amorcée, bien que le transport des voyageurs ne soit pas encore véritablement opérationnel. Le ministère des Transports va travailler en ce sens avec le concessionnaire Sitarail pour l’amélioration du réseau ferré. Quant au trafic aérien, la compagnie nationale Air Burkina, qui a toujours maintenu la desserte de l’aéroport d’Abidjan, soutient la même cadence pour ses vols passagers et cargo.

 

S’agissant de la fourniture d’électricité, comment fonctionne l’interconnexion ivoiro-burkinabé ?

Elle est effective depuis fin 2009 et nous fournit 80 MW sur une consommation totale de 180 MW. Nous diversifions à présent nos sources énergétiques via un projet de centrale solaire développé avec une compagnie minière et en encourageant la production privée.

 

Comment optimiser les échanges ?

La libre circulation des biens et des personnes doit se faire. Sur le plan de la réglementation, les objectifs sont atteints. Reste à présent, à tous et à chacun - partenaires techniques compris –, à faire un effort pour que leur application soit effective.


 

Partager cet article
Repost0
8 septembre 2011 4 08 /09 /septembre /2011 16:41

 

Le développement humain, une priorité

 

Paru dans Arabies – Septembre 2011

 

 

MdsfsFichiers_images_vignettes_visu_mot_ministre.jpg.gifMinistre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité du Maroc, Nouzha Skalli fait le point sur le développement humain au Maroc et sur Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).

 

Quels sont les axes prioritaires de la stratégie du ministère du Développement social, de la Famille et de la Solidarité ?

Le développement humain est la priorité des politiques publiques. Plus de 52% du budget de l’Etat est dédié aux secteurs sociaux. Depuis 2007, nous travaillons de façon participative à l’élaboration du Plan stratégique 2008-2012 en coordonnant les programmes de développement social, en mobilisant les acteurs et en renforçant le dispositif institutionnel. Le Plan vise à la promotion des droits de la femme, l’approche des genres, l’égalité des chances et la mise en place d’une politique familiale intégrée. Il s’attache également à promouvoir les conditions des enfants, des personnes âgées et de celles en situation de handicap.

 

Quelles sont les réalisations accomplies au plan du développement humain ?

Concernant la promotion des droits de la femme, nous avons élaboré un Agenda gouvernemental 2011-2015 pour l’égalité qui constitue une feuille de route visant à éliminer les discriminations de genre et promouvoir l’égalité. Il fait converger les interventions des 25 départements ministériels et s’articule autour de 9 domaines prioritaires, 30 objectifs et 100 mesures. Nous avons également encouragé la participation politique des femmes. Cela a permis, pour la première fois, l’élection de 3 428 femmes lors des derniers scrutins communaux de juin 2009, contre 127 élues lors des élections précédentes.   

Des avancées remarquables ont été réalisées en matière d’institutionnalisation de la protection des femmes contre la violence à travers le programme Tamkine, qui regroupe 13 secteurs gouvernementaux et 8 agences des Nations Unies (ONU). Ces efforts sont faits par les différents intervenants et secteurs gouvernementaux - dont le nôtre - ainsi que par les institutions publiques et la société civile. La coordination du dispositif incombe au ministère, qui supervise aussi un projet de loi pour renforcer les droits des personnes handicapées et la stratégie nationale pour la promotion des droits des personnes âgées.

S’agissant du développement social, nous appuyions les associations qui œuvrent dans ce secteur à travers le financement de projets, le renforcement de leurs capacités ainsi qu’une aide à leur mise en réseaux et à l’amélioration de leur environnement institutionnel. De nombreux autres chantiers sont par ailleurs soutenus en partenariat avec les organisations de la société civile. Il s’agit de la création de centres sociaux, d’Unités de protection de l’enfant (UPE), d’Espaces multifonctionnels pour les femmes (EMF), de Samu sociaux pour les enfants qui vivent dans la rue, de centres d’accueil de jour pour les personnes âgées...

 

Plusieurs programmes - dont l'Initiative nationale pour le développement humain (INDH) - sont mis en œuvre pour réaliser, à l'horizon 2015, les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Que reste-t-il à accomplir pour atteindre ces objectifs ?

 A quatre années de l'échéance 2015, tant en termes économique que de développement humain, les performances du Maroc le prédisposent à être l'un des Etats en mesurede réaliser les OMD à cette date. C'est une réalité aussi bien confirmée par les analyses du Haut commissariat au Plan qu’appréciée par plusieurs personnalités de l’ONU, y compris son secrétaire général qui est récemment venu en visite au Maroc. Cela témoigne de la grande dynamique menée par notre pays pour améliorer ses différents indicateurs sociaux. Mais cela ne nous empêche pas d’être clairvoyants sur les défis qu’il nous reste à relever.  

 

En 2010, le bureau de l'Unicef à Rabat constatait que, en dépit des progrès rapides du pays, il restait du chemin à parcourir pour les enfants et les femmes au Maroc. Que répondez-vous à cela ?

Nous ne disons pas autre chose… Nous évaluons nos politiques sans aucune complaisance. Si nous sommes fiers des progrès accomplis, nous restons en revanche fortement mobilisés car nous savons que nous devons soutenir nos efforts. En matière de droits de l’enfant, notre pays dispose d’un référentiel : le Plan d’action national pour l’enfance (Pane) 2006-2015 intitulé « Maroc digne de ses enfants ».

Le ministère du Développement social, de la Famille et de la Solidarité a par ailleurs évalué à deux reprises l’action de 17 secteurs gouvernementaux. La première fois en 2008 et la seconde en 2011, à mi-parcours. Ces évaluations ont été soumises à une large discussion avec l’ensemble des participantes et participants au XIIe et XIIe Congrès nationaux des droits de l’enfant. Le bilan est positif, mais nous avons tous ensemble des défis à relever dans tous les domaines d’action du Pane. Nous les avons identifiés et nous sommes en train d’élaborer de nouvelles actions dans ce cadre.


Partager cet article
Repost0
4 septembre 2011 7 04 /09 /septembre /2011 12:35

 

Khalida-Toumi-22.jpgLes grands entretiens

Khalida Toumi – Ministre de la Culture

 

La culture, ciment de la société

Paru dans New African – Septembre-Octobre 2011

 

La culture a-t-elle permis à l’Algérie de retrouver son unité et sa cohésion sociale ?

L’Algérie a vécu sa transition démocratique dans un contexte très difficile, avant même l’avènement des révolutions dans le monde arabe. Elle a affronté cette situation seule et dans l’adversité, face à l’incompréhension d’une grande partie de l’opinion internationale. Le projet de société esquissé par l’islamisme radical, et qui a longuement été favorisé par le silence complice ou par des sympathies naïves du monde occidental, a mis à l’épreuve la cohésion sociale. C’est au prix de lourds sacrifices que l’entreprise terroriste a échoué. Il est vrai que durant une décennie, la cohésion a failli être ébranlée et que l’unité nationale a été menacée. Ce sont les valeurs culturelles authentiques, communément partagées par la majorité du peuple algérien, qui ont constitué le rempart sur lequel s’est heurté le projet intégriste. L’attachement indéfectible à ces valeurs essentielles de paix et de liberté a aussi été un rempart face aux tentatives de destruction, d’asservissement et d’aliénation coloniales. C’est en effet en puisant dans nos traditions ancestrales de tolérance et de dialogue que nous appréhendons nos relations avec les autres.  

 

Comment définiriez-vous la culture algérienne ?

La culture algérienne puise ses fondements dans l’Histoire, plusieurs fois millénaires, de l’Algérie. C’est une culture plurielle faite d’apports de multiples civilisations. Sa spécificité réside dans le sentiment d’appartenance communément partagé par le peuple. Ses contours essentiels sont définis par la Constitution qui fixe les référents identitaires de la nation algérienne : l’amazighité, l’arabité et l’islam. L’histoire et la géographie du pays sont également imprégnées par l’Afrique et la Méditerranée.  Cette diversité, pleinement assumée et consacrée, se traduit dans le contenu de la politique gouvernementale, lequel vise à conserver et à valoriser les différentes dimensions de la culture algérienne.

 

Quelles sont les actions menées pour valoriser le patrimoine culturel ?

Avec plus de deux millions d’années d’histoire et un million et demi de kilomètres carrés, l’Algérie possède un immense patrimoine culturel matériel et immatériel. Sa prise en charge nécessite des moyens à sa mesure, mais avant tout un important cadrage juridique et institutionnel. C’est à ce titre que nous avons élaboré les textes relatifs à sa protection, en marquant ainsi une rupture avec la vision ancienne héritée de la colonisation, et en mettant en œuvre le schéma national directeur des zones archéologiques et historiques 2009-2025.  Il assure la protection, la restauration et la mise en valeur de cet héritage dans toute sa diversité et dans toutes les régions du pays. Nous avons aussi introduit des concepts nouveaux comme les parcs culturels nationaux du Tassili, de l’Ahaggar, du Touat-Gourara-Tidikelt, de Tindouf et de l’Atlas saharien. Ces cinq parcs couvrent actuellement une superficie de plus de 900.000 km2. L’Algérie compte actuellement 13 secteurs sauvegardés et 6 autres sont en cours de création. De très grandes actions d’encadrement institutionnel et juridique ont été initiées comme la création d’un Office de gestion et d’exploitation des biens culturels protégés, d’une Ecole nationale de conservation et de restauration, d’une Agence nationale des secteurs sauvegardés ainsi que la qualification d’architectes-restaurateurs, seuls habilités à intervenir sur les sites et monuments historiques. La recherche a été redéfinie dans le sens d’une meilleure compréhension de l’Histoire, dans toutes ses dimensions. Le ministère de la Culture dispose ainsi de deux centres de recherches : le Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques et le Centre national de recherche en archéologie (CNRA). La création d’un fonds du patrimoine culturel est parallèlement impulsée par les pouvoirs publics.

 

La culture algérienne est riche et variée. Pouvez-vous préciser ses domaines d’excellence ?

On compte de brillants écrivains (en arabe, en tamazight et en français), de grands dramaturges, d’excellents chorégraphes et danseurs, de magnifiques artistes plasticiens, de formidables musiciens et interprètes, etc. Le domaine de la musique foisonne de groupes de rock, de jazz, de  gnawi, de musique targuie et kabyle, et de fusion du type world music qui revisitent tous ces genres musicaux. Nous avons des milliers de talents dans toutes les régions. S’agissant de la musique andalouse, des centaines de troupes émergent dans tous les coins du pays. Il en est de même dans le registre classique universel où des jeunes, issus des écoles de musique, embrassent une carrière internationale. Je pense notamment à Amal Brahim Djelloul. Dans le domaine de la danse, traditionnelle ou contemporaine (notamment le hip hop qui suscite un énorme engouement), des dizaines de troupes se créent avec succès. Le casting du chorégraphe Abousefiane Lagraa a drainé plus de 400 jeunes de l’ensemble du pays, et le spectacle Nya, réalisé en Algérie, a obtenu de nombreux prix, dont celui de la meilleure chorégraphie de l’année 2011, récemment décerné par le syndicat professionnel français de la danse. Les écrivains d’envergure internationale qui sont sélectionnés ou récipiendaires de grands prix ne manquent pas. Je citerai Kamel Daoud, Wacyni Laaredj, Ahlem Mostaghanemi, Yasmina Khadra, etc. Les éditeurs ne sont pas en reste puisque la jeune maison Barzakh vient également de recevoir un prix prestigieux. Dans les arts visuels, et plus particulièrement les arts contemporains, je pense bien sûr à Rachid Koreïchi, mais également à des artistes plus jeunes, tels Zineb Sedira, Kader Attia. Le cinéma est également distingué. Des réalisateurs s’imposent dans les arènes internationales et glanent de nombreux prix. Parmi eux, Abdenour Zahzah, qui en est à son douzième prix international pour son court métrage Garagouz, ou encore Yacine Téguia, Khaled Benaissa, Yannis Koussim et beaucoup d’autres. Nous accompagnons ces talents - toutes générations confondues - avec l’ambition d’édifier une véritable industrie culturelle créatrice d’emplois et de richesses. C’est là notre principal objectif.

 

Comment s’articule la politique culturelle algérienne ?

Le renouveau culturel esquissé par l’Etat durant ces dernières années vise à renforcer la cohésion sociale en considérant la culture comme le ciment de la société, dans ce qu’elle représente comme valeurs communément partagées. Cette politique favorise notamment ses conditions d’exercice et d’accès, à travers le maillage du territoire national en espaces de pratique et de diffusion. La création et l’accompagnement des artistes dans leur entreprise sont soutenus, ainsi que l’émergence d’une industrie compétitive au plan régional et international. Grâce à l’intérêt qui lui est désormais accordé au plus haut niveau de l’Etat, la culture est perçue comme un vrai vecteur de développement durable. Les moyens mis à la disposition du secteur ont été multipliés. L’accent est notamment mis sur la promotion de la lecture publique via la réalisation de 1 541 bibliothèques, sur le soutien à l’édition de 1 000 titres chaque année, et sur l’élargissement des opportunités de travail en faveur des artistes. L’institutionnalisation de plus de 130 festivals culturels est également actée, ainsi que l’organisation de tournées artistiques, l’accompagnement financier de plus de 400 associations et de plus de 100 producteurs ou réalisateurs de films ou théâtres… La jeunesse est particulièrement ciblée par cet effort colossal. L’objectif est de permettre l’éclosion de leur génie créatif et leur participation au rayonnement de la culture nationale, notamment grâce aux nouvelles technologies de l’information et de la communication.

 

Le plan quinquennal 2010-2014 consacre un budget conséquent à la culture. Quelles sont vos priorités ?

Tout en notant avec satisfaction l’intérêt accordé au secteur de la culture dans le plan quinquennal, le déficit reste important et les besoins ne cessent d’évoluer. Notre ambition de doter chaque ville en nombre suffisant d’infrastructures et équipements culturels appropriés, conformes aux normes, requiert davantage d’investissements et de moyens. La volonté politique de renforcer ce secteur existe, mais c’est au niveau de l’exécution que nous continuons à mener ce passionnant combat pour le rayonnement culturel. Par « niveau d’exécution », nous entendons les procédures complexes pour l’adoption et l’inscription des projets, la question récurrente du foncier et du choix des sites, notamment au niveau des agglomérations, les capacités de réalisation, la technicité requise…

 

Comment l’Algérie compose-t-elle sa partition culturelle au sein de l’Afrique ?

La culture continentale est indéniablement une composante essentielle de celle de l’Algérie. Avec l’Afrique, nous partageons d’abord un continent, une identité, un passé fait de souffrances coloniales, mais aussi un destin commun. Ces données à elles seules rapprochent nos créateurs sur des thématiques communes. Le rôle de notre pays dans la défense de ces valeurs est chaque fois réitéré à l’occasion de la conférence des ministres de la culture des Etats africains, ainsi que des instances du  Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD). De même, nos liens se sont affirmés lors de l’organisation du premier Festival culturel panafricain, en 1969, et se sont réaffirmés, pour sa deuxième édition, en 2009.

 

Algerie-02-Julliet-033.jpg  Algerie-02-Julliet-numero-2-010.jpg 

 

Partager cet article
Repost0
20 août 2011 6 20 /08 /août /2011 13:32

 

Chérif Rahmani

Ministre de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement

 

Vers l’aménagement durable

 

Paru dans New African – Septembre-Octobre 2011

 

Images-2-0316.JPGUn nouveau Schéma national d’aménagement du territoire (SNAT) pour les vingt prochaines années vient d’être adopté en Algérie. Chérif Rahmani, ministre en charge de ce dossier, explique la mise en œuvre de cette stratégie dont l’objectif est d’assurer l’équilibre entre les régions du nord, les Hauts-Plateaux et le Grand Sud, d’améliorer l’attractivité et la compétitivité des territoires, tout en favorisant le développement durable.

 

Propos recueillis par véronique Narame

 

Quels sont les objectifs du Schéma national d’aménagement du territoire ?

Depuis la fin des années 1960, l’Algérie a mis en œuvre de nombreuses politiques de développement. Ces choix, opérés dans le cadre d’une planification centralisée et d’une économie administrée telles qu’elles prévalaient alors, se sont avérés partiels et insuffisamment appuyés pour que les effets attendus se matérialisent. Des déséquilibres se sont accumulés selon un gradient de décroissance du Nord au Sud (littoral, Tell, Hauts Plateaux, Sud). Le plus évident est l’hyper-concentration de la population dans la bande littorale, là où les bassins de main-d’œuvre et les facilités (eau, énergie, infrastructures, potentialités naturelles) sont les plus abondants, mais où l’espace est le plus rare, et la fragilité environnementale et les risques sismiques sont les plus élevés. 

Avec le choix opéré, au début des années 1990, en faveur de l’économie de marché et de la liberté d’entreprendre et de se localiser, le risque était grand de voir les déséquilibres s’accentuer aux dépens des régions intérieures. Mais le gouvernement algérien a décidé de réagir, et le président Abdelaziz Bouteflika a affirmé une vision globale du territoire avec la création du ministère de l’Aménagement du territoire et de l’environnement (MATE) en 2000. Et en 2010, la loi portant Schéma national de l’aménagement du territoire (SNAT) pour 2030 a été promulguée. Cette démarche participative se renforce aujourd’hui, notamment via différents instruments qui sont, à des degrés divers, en cours de finalisation. La définition d’un système d’incitations économiques et financières adaptées aux spécificités des différents territoires, ainsi que l’amélioration de la gouvernance territoriale, vont également aider à la délocalisation des activités. Le SNAT constitue le document de référence qui permettra à l’Algérie d’être réconciliée avec l’ensemble de ses territoires, d’améliorer leur attractivité et leur compétitivité, et d’être ancrée résolument dans la voie du développement durable.

 

Comment l'Algérie conçoit-elle la construction de ses nouvelles villes ? 

Sous l’effet conjugué de l’explosion démographique (la population a pratiquement quadruplé depuis l’indépendance) et de l’exode rural, les villes algériennes ont connu de grandes mutations.  Le taux d’urbanisation, qui était de 31,4% en 1966, est passé à 63% aujourd’hui. Cette évolution rapide a engendré des déséquilibres. L’armature urbaine reste dominée par les grandes villes (Alger, Oran, Constantine, Annaba), à travers l’extension de leur périphérie. Le nombre de villes de plus de 100 000 habitants a considérablement augmenté. On en compte une trentaine aujourd’hui. Elles vont constituer le niveau fort de l’armature urbaine actuelle, mais il leur manque encore l’assise économique suffisante pour diffuser le développement dans leur hinterland. A cela s’ajoute leur inadaptation fonctionnelle du fait de l’absence de centralité, du développement incontrôlé (et souvent illégal) des périphéries porteuses de risques de déstabilisation sociale, et des carences de la gestion urbaine.

En dehors de quelques exceptions, les grands centres urbains ne sont pas encore en capacité de remplir convenablement leurs fonctions économiques et sociales. Le SNAT 2030 a donc pour objectif la mise en place d’un système capable de structurer le territoire. Il est constitué des quatre grandes métropoles qui ont le plus de potentiel, et qu’il convient de préparer à la compétitivité dans le cadre d’une économie mondialisée. Il inclut également les villes du Tell, des Hauts-Plateaux et du Sud, ainsi que les Villes nouvelles d’excellence.

Sur la question de l’amélioration de l’urbanisme, seule une politique nouvelle, répondant aux exigences d’une architecture moderne et aux typologies de l’architecture traditionnelle, est à même d’opérer un redressement, tant il est vrai que depuis l’indépendance du pays, et pour faire face aux besoins sans cesse croissants en logements, la qualité a été délaissée, laissant se profiler des quartiers assimilables à de mauvaises banlieues européennes, en rupture avec l’architecture méditerranéenne et maghrébine.

 

Des pôles de compétitivité et d'excellence sont développés. De quoi s’agit-il ?

Il s’agit de renforcer l’attractivité des territoires en érigeant deux des pôles de compétitivité et leurs zones intégrées de développement industriel (ZIDI), ainsi que des technopoles, à l’intérieur et en dehors des villes nouvelles. Le pôle de compétitivité consiste à mettre en place, sur un même lieu ou en réseau sur plusieurs wilayas, des compétences diverses : centres de formation et de recherche, grandes entreprises de portage, petites et moyennes entreprises, startups…Cette ville nouvelle est un espace où éducation, recherche, information, savoir-faire et innovation rétroagissent positivement.

Trois pôles de compétitivité sont programmés. Celui de Sidi Abdallah qui est spécialisé dans les TICs et les technologies avancées (industries pharmaceutiques) ; le Pôle de compétitivité de Bouinan dédié aux biotechnologies « industries agroalimentaires » et « médecine et pharmacie » ; la ville Nouvelle de Boughzoul, pour les technologies vertes.

 

Vous pilotez un ministère éminemment sensible, celui de l’Environnement. Quels sont les défis majeurs auxquels est confrontée l'Algérie et quelles solutions sont envisagées ?

Le dérèglement du climat par la croissance de l’effet de serre est certainement le plus gros défi au modèle de développement qui a jusqu’alors prévalu. L’Algérie est concernée au premier chef, mais également l’Afrique. Notre pays anime les négociations du Groupe africain sur le climat au plan mondial. La baisse de précipitations et le stress hydrique, avec les risques d’arbitrage en défaveur de l’eau d’irrigation, les vagues de sécheresse et les inondations qui, au-delà de leur aspect meurtrier, accélèrent et emportent de larges superficies de terres arables, posent le problème de la sécurité alimentaire du pays.

Certes, certaines mesures sont prises. De vastes programmes de mobilisation de ressources en eau (barrages, stations de dessalement) et d’ouvrages de transfert vers les régions déficitaires sont mis en œuvre. Un Plan national de lutte contre la désertification (PNLCD), a été défini et connaît un début d’application. De larges superficies de régions de steppes, menacées par la désertification, sont mises en défens. Mais, il faudra aller plus loin. La gestion rationnelle des ressources en eau et la promotion d’une agriculture adaptée à l’évolution du climat, à travers la recherche d’espèces résistantes aux différents stress (thermique, salin, hydrique), constituent des priorités.

L’épuisement à terme des ressources en hydrocarbures (pétrole/gaz), tout comme les impératifs de la lutte contre le changement climatique qui imposent la réduction des émissions dues à la combustion des énergies fossiles, nécessitent l’introduction progressive et soutenue des énergies renouvelables. L’Algérie, à travers son gisement solaire de grande importance et de haute qualité, dispose dans ce domaine d’atouts incontestables. Tant pour son marché intérieur qu’à l’exportation (énergie d’origine solaire), dans la perspective de l’interconnexion en cours des rives Nord et Sud de la Méditerranée. Un premier Plan de développement des énergies renouvelables a été élaboré par le ministère de l’Energie et des mines et a été présenté au gouvernement.

Enfin, et surtout, l’Algérie a décidé d’élaborer son Plan national climat pour répondre aux différents défis climatiques qui se posent et se poseront à elle. Un Comité intersectoriel a été mis en place et a entamé ses travaux, de même qu’une Agence nationale des changements climatiques (ANCC) et une Autorité nationale désignée pour le mécanisme de développement propre (AND-MDP).

 

Que dire des projets en faveur des énergies renouvelables qui émergent sur le continent ?

L’Afrique a de grands besoins en énergies et n’a de cesse de voir aboutir des projets comme Desertec, Inga ou le Trans-African Gas Pipeline reliant le Nigeria à l’Europe via l’Algérie. Depuis le milieu des années 1990, l’Algérie milite pour des programmes solaires au Sahara et ne peut qu’être satisfait par des propositions comme Desertec ou le Plan solaire méditerranéen. Mais il faut convenir que certaines questions restent encore floues. Quelle sera la place réelle et chiffrée pour l’électricité d’origine solaire dans les pays de la rive nord, et à quelle échéance ? Quels types de technologies ou de partenariat ? Ce dernier point est particulièrement décisif.

L’Algérie est certes désireuse de produire de l’électricité solaire, pour ses propres besoins et à l’exportation, mais elle ne saurait accepter de louer des espaces pour l’exploitation de son gisement solaire. Aussi, envisage-t-elle cette alternative en intégrant les stratégies des différents pays pour faire émerger une stratégie commune euro-méditerranéenne. Cela permettrait, dans un premier temps, de tester des modes de coopération mutuellement avantageuses. Les Pôles de compétitivité des Villes Nouvelles de Boughzoul et de Hassi Messaoud, ainsi que la Ville de Hassi R’mel dont la fonction est la promotion des technologies vertes et des énergies renouvelables, sont des centres d’accueil privilégiés pour ce type d’actions.

 

L’Afrique, qui ne contribue qu’à hauteur de 4% aux émissions mondiales de gaz à effet de serre, demeure pourtant la plus vulnérable aux changements climatiques. Comment l'Algérie se positionne-t-elle par rapport à cette problématique ? 

L’Algérie assure la présidence du Groupe de préparation et a accueilli, en 2008, la Réunion des points focaux et négociateurs africains sur les changements climatiques, ainsi que la Réunion ministérielle africaine sur les changements climatiques. Ces deux réunions ont permis l’adoption d’un document de base, la Plate-forme africaine sur le climat vers Copenhague, et la Déclaration d’Alger.  Par ailleurs, le Comité africain des chefs d’Etat et de gouvernement institué par le Sommet de l’Union africaine à Syrte, en 2009, a chargé l’Algérie d’animer les négociations sur les changements climatiques au niveau africain, aux Sommets de Copenhague et de Cancun.

Les questions qui ont été examinées par notre continent sont nombreuses et sont reliées. Elles ont trait au partage d’une vision sur la base du principe des responsabilités communes - mais différenciées - (l’Afrique n’étant responsable que de 4% des émissions), aux programmes d’adaptation et d’atténuation pour faire face aux impacts des changements climatiques, au rôle de la science et des transferts technologiques. L’Afrique insiste sur la dynamisation du marché du carbone, sur la création d’un Fonds multilatéral pour un meilleur partage des connaissances, et surtout, sur la mobilisation de ressources financières nouvelles, conséquentes et additives, qui ne soient pas allouées au titre de l’aide au développement - et donc au détriment de la lutte contre la pauvreté et autres priorités -, mais qui soient  utilisées pour faire face de manière responsable aux enjeux du changement climatique.

La question du financement est cruciale et conditionne le succès des négociations à venir. Elle doit être assumée – et cela relève d‘une éthique élémentaire – par les pays qui ont émis de manière cumulée le plus de gaz à effet de serre. Lors de la Conférence des chefs d’Etat africains de Ouagadougou, en octobre 2009, l’Afrique a chiffré ses besoins en financements à 65 milliards de dollars. Elle est et restera unie sur ces questions.

 


Partager cet article
Repost0
31 juillet 2011 7 31 /07 /juillet /2011 19:04

 

« Le développement humain

est la priorité des politiques publiques »

 

Paru dans Les Afriques – Hors-série N° 2 Juillet-Août 2011

 

images-copie-2.jpgNouzha Skalli, ministre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité, nous commente, en détail, l’actualité sociale du Maroc. Plus de la moitié du budget de l’Etat marocain est consacré aux projets sociaux. Des progrès ont été accomplis dans de nombreux domaines, même si le PNUD tarde à les répercuter dans son classement « dépassé », selon Mme Skalli.

 

Les Afriques : Le ministère du Développement social, de la famille et de la solidarité, est à l'articulation de nombreux domaines d'interventions. Lesquels sont-ils ?

Nouzha Skalli : Notre ministère a pour mission la coordination des politiques publiques en matière de développement social, de promotion des droits des femmes, des enfants, des personnes âgées et des personnes en situation d’handicap. Dans le domaine du développement social, nombreuses sont les réalisations menées en partenariat avec les organisations de la société civile, comme la création de centres sociaux, d’unités de protection de l’enfant, d’Espaces multifonctionnels pour les femmes, de Samu sociaux pour les enfants en situation de rue, de centres de jours pour les personnes âgées etc. En matière de promotion des droits des femmes et de l’égalité, notre pays a accompli des réformes très importantes. L’égalité des sexes et la parité ont ainsi été consacrées, et lors des dernières élections communales, en 2009, 3428 femmes ont été élues, contre seulement 127 auparavant.

 

LA : Quel est le bilan, en 2011, de l'Initiative nationale pour le développement humain (INDH) mis en œuvre pour réaliser, à l'horizon 2015, les Objectifs du millénaire pour le développement ?

NS : Le développement humain est la priorité des politiques publiques. A ce jour, 22 000 projets ont été réalisés et plus de 5 millions de personnes en ont bénéficié. L’action gouvernementale a consacré plus de 52% du budget de l’Etat aux secteurs sociaux à travers différentes stratégies qui ont permis un net progrès. Selon le dernier rapport établi par le Haut Commissariat au Plan, le taux de pauvreté relative est passé de 16,3% en 1998, à 8,8 % en 2008. Il en est de même dans les communes ciblées par l’INDH, où ce taux a fortement baissé (de 36% à 21%). Sur la même période, l’espérance de vie à la naissance, qui était de 65,5 ans en 1988, est de 74,8 ans en 2009. La mortalité maternelle a diminué de moitié, avec 112 décès pour 100 000 accouchements (contre 227 décès en 2004).

De nombreuses mesures sociales ont été adoptées dans le cadre du programme d’urgence pour la généralisation de l’enseignement et la lutte contre l’abandon scolaire, avec, entre autres actions, l’attribution de bourses scolaires et la construction de pensionnats dans le  monde rural. Ainsi, 96% des enfants de six à onze ans sont actuellement scolarisés et le rapport fille/garçon dans le primaire est passé à 89%. Le budget dédié à l’éducation équivaut actuellement à 24% de celui de l’Etat et correspond à 6,4% du PIB. Il a augmenté de 33% en 2010 par  rapport à 2008.

Au niveau de l’accès aux services sociaux de base, la fourniture en électricité est généralisée en milieu urbain, et elle atteint 83,9% en milieu rural, en 2009, contre 9,7% en 1994. Concernant l’accès à l’eau potable, 90% de la population en bénéficie (14% en 1994), et l’objectif vise à la généralisation de la distribution d’eau avant 2015. Si nous sommes fiers des progrès accomplis, nous restons cependant fortement mobilisés car nous savons que de nombreux défis restent à relever.

 

LA : Quelles sont vos réactions s’agissant du classement du Maroc en 114ème position sur 169 pays, dans le rapport 2010 sur le développement humain du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) ?

NS : Il y a lieu de rappeler que le classement établi annuellement par le PNUD se fait sur la base de l’IDH (Indice du développement humain), créé en 1990, qui est, à ce jour, largement dépassé. La classification du PNUD se limite en effet à la moyenne arithmétique de trois indices : l’espérance de vie à la naissance, l’alphabétisation et la scolarité, ainsi que le PIB par habitant. S’agissant du PIB, il est calculé sur une base qui ne tient pas compte des disparités de répartition des richesses et favorise les pays riches, sans tenir compte des efforts consentis par les autres pays. L’IDH du PNUD ne prend en compte ni les infrastructures de base, ni l’emploi, et pas davantage l’investissement public, la lutte contre les inégalités, le recul du taux de pauvreté, le coût de la vie, le niveau des salaires, les libertés et droits humains, la gouvernance, le genre, l’environnement, la sécurité des individus, etc. Enfin, l’IDH est statique mais d’autres rapports du PNUD, qui évaluent la dynamique sociale, classent le Maroc parmi les dix premiers pays du monde en termes de progression de l’IDH. D’ailleurs, entre 2009 et 2010, le pays a gravi des échelons de manière sûre en termes de développement humain, se hissant du 130ème au 114ème rang.  

 

LA : L’actualité politique du Maroc est foisonnante. Pouvez-vous nous en parler ?

NS : Nous avions rendez vous le 1er juillet pour le référendum qui a ouvert la porte à un Maroc nouveau et uni autour d’un projet de société moderne et démocratique, porté par le roi Mohammed VI. Ce projet de constitution consacre la séparation des pouvoirs et leur équilibre dans le cadre d’une monarchie constitutionnelle, démocratique, parlementaire et sociale. A la différence des pays qui ont connu des changements dans un contexte douloureux de ruptures violentes, des réformes profondes se réalisent au Maroc dans un climat constructif de dialogue et de concertation très élargis. C’est le fruit d’une démarche participative et de concertation large avec les partis politiques, les syndicats et la société civile.   

 


Partager cet article
Repost0