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  • : VERONIQUE NARAME - JOURNALISTE
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LE CHOIX DE LA REDACTION

 

 

ALTERNATIVES INTERNATIONALES  n° 067

Juin 2015

       Boko Haram épuise le Cameroun

Par Véronique Narame
A Maroua et Minawao
 
couverture
                  

Depuis un an, le Cameroun fait face aux assauts meurtriers de la secte nigériane Boko Haram. Et contribue, depuis 2013, à l'accueil sur son territoire de 40 000 réfugiés nigérians dans le camp de Minawao.

 

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LE CHOIX DES INTERNAUTES

JUIN 2015

Algérie / Industrie électrique et électronique : Moderniser et restructurer

Algérie  / Maritime : L'Algérie combine mer et terre

Côte d'Ivoire / Socitech Groupe : Contribuer à la digitalisation de l'Afrique

Burkina Faso / Sibiri François Yaméogo, Styliste Modéliste

Algérie / Photo reportage au Salon international du livre d'Alger

Burkina Faso / Des infrastructures performantes pour l'industrie

 

 

5 mars 2011 6 05 /03 /mars /2011 20:47

 

Quelles conséquences

pour les Burkinabé ?

 

Paru dans New African - Mars-Avril 2011

 

Si la crise en Côte d’Ivoire n’a pas fondamentalement bouleversé les équilibres au Burkina Faso, elle a néanmoins amené son lot de changements.

 

Depuis que la situation est devenue problématique chez son voisin ivoirien, le « pays des hommes intègres » a eu le temps de se retourner. Il a d’abord réintégré ses migrants qui ont été contraints de fuir la Côte d’Ivoire à partir de 1999, et plus massivement encore en 2002. A cette époque, plus de 125 000 personnes ont été prises en charge par les autorités burkinabé dans le cadre de l’opération Bayiri.

Le Gouvernement a ensuite dû aménager d’autres itinéraires pour le transport des marchandises, en contournant autant que possible le territoire ivoirien. Ce dispositif est renforcé avec la crise post-électorale que traverse depuis plus de deux mois le pays.

A défaut de pouvoir utiliser sans encombre le couloir qui mène au port autonome d’Abidjan (PAA), ce sont désormais les ports du Ghana (Tema et Takoradi), du Togo (Lomé) et du Bénin (Cotonou) qui pallient la faible activité du port ivoirien sur lequel avait pourtant été reportées 70% des importations burkinabé. Ouagadougou continue donc à être approvisionné comme il se doit. En revanche, certaines régions subissent de plein fouet les effets de la crise ivoirienne, comme c’est le cas des Hauts-Bassins, du Sud-Ouest et des Cascades.

Bobo Dioulasso est davantage touchée par la crise ivoirienne. La deuxième ville du pays, située à l’intersection des routes qui mènent au Mali, en Côte d’Ivoire et au Ghana, n’est plus fournie, comme de coutume, en marchandises en provenance directe du PAA.

 

Trafic perturbé

visiter_gare.jpgA quelque 150 kilomètres de la cité de Sya, Niangoloko, premier poste de douane burkinabé, voit ses recettes journalières se réduire. Il en est de même des trains au départ du port ivoirien et à destination des agglomérations bobolaises et ouagalaises dont le trafic est perturbé et qui ne transportent plus le même volume de produits d’importation et d’exportation. Les affaires des commerçants installés à proximité de la gare ferroviaire exploitée par Sitarail tournent au ralenti. Des intermédiaires burkinabé ravitaillent en hydrocarbures, en riz et autres produits de consommation la région Nord de la Côte d’Ivoire, laquelle est enclavée depuis la partition du pays en 2002.

Pendant ce temps, les prix flambent, a l’instar de celui d’une bouteille d’huile vendue 1 500 F.CFA alors qu’il y a peu, elle était encore à 1 000 F.CFA. Quant au riz, le sac de 5 kg est passé de 3 250 F.CFA à 4 500 F.CFA, et le savon, de 275 F.CFA à 400 F.CFA.

Ce surenchérissement des prix est occasionné par le déroutage du port d’Abidjan vers les autres villes portuaires de la sous-région et par l’allongement des distances qui en résulte. Bobo Dioulasso est à plus de 1 300 kms de Lomé et d’Accra tandis qu’Abidjan est à 800 km. Le corridor ivoirien avait été naturellement privilégié, en 2009 et 2010, pour acheminer, par rail, 60% de la récolte de coton et la majorité des produits d’importation du Burkina Faso. La liaison s’effectuait en 11 jours. Il en faut désormais 17, par route, pour accéder au port togolais, tandis qu’il faut 20 jours pour relier Tema.

 

Des intérêts communs

A ces délais et ces surcoûts, s’ajoutent les retards générés par l’engorgement des ports de la sous-région dont le volume de fret s’accroît. Dans celui de Lomé, ce sont quelque 8,5 à 9 millions de tonnes qui seront manutentionnés en 2011, contre 8 millions en 2010. Chez le voisin ghanéen, depuis l’éclatement de la crise ivoirienne, le trafic cargo à Tema est passé de 8,3 millions à 10,8 millions de tonnes. Dans ce même port ainsi que dans celui de Takoradi, plus de 28 000 tonnes de riz importées par le Burkina Faso y ont d’ailleurs transité en 2010.

« Depuis le confit de la Côte d’Ivoire, le Ghana est devenu un des itinéraires principaux du Burkina Faso, du Mali et du Niger pour les cargaisons en transit », atteste Ghana ports and harbours. Depuis Takoradi qui traite de grosses quantités de marchandises destinées au marché burkinabé, ce sont ainsi 2 000 tonnes de blé à destination de Ouagadougou qui ont été transbordées, à la fin du mois de décembre 2010.

Le port de Cotonou, en progression de 27% en 2010, assure également la desserte du Burkina Faso. Il faut néanmoins compter vingt-quatre jours pour relier les deux capitales, soit le double du temps qu’il fallait jadis pour effectuer par la ligne de chemin de fer les 1 122 km entre Abidjan et Ouagadougou…

L’autre conséquence du contournement de l’axe ferroviaire ivoirien et de la voie bitumée a été de saturer les routes du territoire burkinabé et des pays frontaliers. Le corridor Lomé-Ouagadougou-Niamey reçoit à lui seul un flux sans précédent de marchandises, ce qui n’est pas sans poser de problèmes en termes d’entretien des voies et de contrôle de la circulation.

 

Par-delà les frontières, des liens humains

Le Burkina Faso a pu redéployer son schéma de circulation vers des zones plus sécurisées en contournant au maximum le corridor ivoirien. Mais il ne lui est pourtant pas possible de tourner radicalement le dos à la Lagune Ebrié, ne serait ce que pour son approvisionnement en produits pétroliers. Ceux-ci sont, en effet, fournis en partie par la Société ivoirienne de raffinage (SIR), dont l’Etat burkinabé détient, via la Société nationale burkinabé d'hydrocrabures (SONABHY), 5,39% du capital. La raffinerie ivoirienne possède également une filiale, la SMB (Société multinationale de bitume), qui est le principal fournisseur de bitume du Burkina Faso. En outre, la Société nationale d’électricité du Burkina (SONABEL) est également alimentée en électricité par une interconnexion avec la Côte d’Ivoire qui fonctionne depuis 2001.

Au-delà de ces alliances économiques et commerciales, les deux pays sont intrinsèquement unis par des liens humains. La plus significative illustration est l’importance de la présence burkinabé en territoire ivoirien. Elle représente 3 millions de personnes. « Le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire sont deux pays étroitement liés par l’Histoire et la géographie. Autrefois colonisés par la France, ils ont, à un moment donné, formé un seul pays. Leurs relations sont très anciennes et très imbriquées », confirme le ministère burkinabé de l’Action sociale et de la solidarité nationale.

C’est ce qui pourrait expliquer que les deux nations soient au final « condamnées » à coopérer en bonne intelligence. Cette grande proximité oblige en conséquence les « Eléphants » et les « Etalons » à des ajustements et à des compromis, de sorte que les équilibres des uns ne soient pas atteints par les dysfonctionnements des autres. De la même manière, les peuples doivent trouver des solutions pour remédier aux difficultés que génère la tension en Côte d’Ivoire et qui, par-delà les frontières, rejaillit inévitablement sur le Burkina Faso.

 

 

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